Danse, suspension et environnement
Danse, suspension et environnement
Structure et architecture, des espaces nouveaux dans l’espace des habitudes
Poser un objet artistique dans l’espace public, c’est pour Séverine BENNEVAULT CATON la possibilité de transformer et interroger l’environnement quotidien, en modifier la lecture, créer de nouveaux espaces.
C’est faire naître un dialogue architectural entre les formes existantes et une forme plastique voulue sobre, ses lignes épurées dessinant une alternative à tout ce que l’espace public propose de vertical, l’univers urbain minéral et végétal, les bâtiments et les arbres.
L’apparition de cette forme plastique monumentale interroge et remet en question l’horizon, le champ de vision… , propose une autre appropriation et utilisation de l’espace public.
En suggérant une lecture inédite des espaces quotidiens, une perspective nouvelle émerge, et avec elle, une dimension supplémentaire. La suspension, l’air, l’envol, permettent aux corps de tracer d’autres trajectoires dans un espace de danse en trois dimensions pleinement occupé, qui prend vie dans l’espace défini par la structure, lui-même positionné dans l’espace public.
Espaces et dimensions s’imbriquent.
Evoluer dans l’espace public fait naître une relation multiple, à la fois fusion et confrontation des volumes, des lignes, des bâtiments et des mouvements. Face à l’apparition soudaine d’un objet gigantesque, le public pose un regard nouveau sur son environnement quotidien, devenu partie intégrante de l’œuvre artistique.
La structure magnifie l’espace public par son esthétisme et son incongruité. Modifier les volumes de l’environnement quotidien c’est chorégraphier l’espace, l’architecturer par les corps en mouvement évoluant dans une œuvre plastique habitée. L’architecture et la danse en suspension forment un tout.
C’est aussi opposer le mouvement ininterrompu de la ville ou du monde extérieur et la bulle spatio-temporelle créée par le microcosme de la structure, ‘l’habitat’ des danseurs, le spectacle.
Poser la ‘structure-spectacle’ dans l’espace public c’est suggérer un partage de territoire, une cohabitation, une rencontre entre le quotidien et l’inattendu, entre le figé et le mouvant, entre le durable et l’éphémère, entre le monumental et l’intime
Danser dans l’espace public, une relation intime entre danseur et spectateur
Danser dans l’espace public c’est pour Séverine BENNEVAULT CATON, la possibilité de faire dialoguer des histoires, celle du lieu investi, de chaque spectateur, habitant, passant, et celle du spectacle, des danseurs.
L’espace public a sa propre histoire, celle de son évolution, celles des personnes qui’ l’ont habité ou traversé. L’objet artistique posé dans l’espace comporte son propre univers – le spectacle -, il est donc lui-même chargé de sa propre histoire.
C’est cette histoire qu’il propose de partager dans l’espace qu’il vient combler momentanément, avec les personnes qui vivent dans cet espace, qui l’habitent, qui font son histoire.
Danser à l’extérieur permet d’annihiler le ‘4ème mur’, la séparation entre le plateau et le public, de laisser une trace sensorielle dans la mémoire corporelle du spectateur en créant une relation intime entre lui et le danseur par le biais direct du corps en mouvement et de l’émotion qu’il génère, tant pour lui-même que pour les autres.
Deux dialogues s’instaurent : le grand, celui de l’espace public et la structure imposante, et le petit, celui du spectateur et du danseur, l’intimité qui les unit.
La danse en suspension, ou l’exploration de dimensions et de sensations nouvelles
La danse en suspension crée des ‘danseurs augmentés’. Grâce à elle, ils rencontrent de nouvelles possibilités : les contraintes deviennent des opportunités.
S’ouvre à eux l’accès sur une dimension supplémentaire :celle qui se trouve juste au-dessus du sol, voire plus haut, celle ou ils ont la possibilité de se maintenir en lévitation, celle que l’on serait tentée d’appelée ‘vide’ : là ou tout est possible car aucun obstacle n’existe.
Une danse ‘augmentée donc, mais augmentée physiquement et non virtuellement par l’ajout d’effets virtuels en 3D. Ici, le virtuel est réel : une réalité augmentée.
La danse en suspension est un dépassement de la danse en tant que discipline ; chorégraphier c’est architecturer l’espace par des corps sensibles en mouvement.
La danse en suspension augmente les possibilités en plaçant les partitions chorégraphiques dans une sorte de dimension supplémentaire : la 3e dimension dans toute sa potentialité.
La danse en suspension modifie le temps connu du mouvement dansé.
Elle transforme l’espace-temps, apporte des possibilités de trajectoires assez ahurissantes, des temps de suspension et de rotation quasi infinis. Elle fait basculer les repères habituels par une apparente annulation de la gravité.
Le danseur explore et investit des espaces autrement inaccessibles. Il a le pouvoir d’évoluer sans toucher terre, donnant au spectateur l’impression que la pesanteur n’existe plus.
Le temps du mouvement est modifié – au-dessus du sol, le danseur peut sauter et ne jamais retomber, voler, se déplacer à des vitesses insoupçonnées, hyper célérité et extrême lenteur.
Le rythme et les trajectoires des mouvements sont différents, distendus, inhabituels.
Le public entre inévitablement dans une autre temporalité. La suspension amène le spectateur à goûter à des sensations physiques inédites: la sensation hypnotique du pendule, celle du rebond « lunaire », de la lévitation…
En suivant des yeux le danseur, le mouvement s’imprime subrepticement dans son propre corps.
Celui-ci se met imperceptiblement à bouger et tangue devant le mouvement de balancier ou les bonds de géants de artiste.
La danse en suspension laisse une trace sensorielle nouvelle dans la mémoire corporelle des spectateurs, leur ouvrant un nouveau territoire de ressentis.
Séverine BENNEVAULT CATON